lundi 30 août 2010

Le soleil comme médaille étincelante

Franck fait des rêves sublimes quelques fois.

Il n'est pas toujours triste.
Des rêves très beaux. D'une puissance qui le gagne jusqu'au fond des tripes. Ce sont comme des expériences mystiques qu'il touche du doigt.
Et puis il se réveille. Et l'autre rêve commence: ça ne s'est pas passé. Il en aurait eu besoin mais ça n'est pas arrivé. Et tout les matins qui le sortent de ces petits paradis émotionnels sont des cauchemars.
Franck fait des cauchemars aussi. Et quand il se réveille, le matin qui le berce de sa lumière lui rappelle que c'est réel. Son cauchemar ne s'est pas passé au même endroit, ni avec les bonnes personnes, mais il n'a rien inventer. C'était il y a une semaine. Non, un mois. Ah oui... c'est vrai.

Il se demande souvent quand est-ce que les choses vont s'inverser.
Et puis il se rappelle que le paradis n'existe pas. Sauf quand on meurt mais ce n'est pas prouvé.
Alors il se dit que les choses ont finalement plus de chances de se passer ainsi jusqu'à la fin des temps, pour lui, que de se passer autrement.

Il se réveillerais d'un cauchemar et puis il y aurait quelqu'un près de lui pour lui dire de ne pas t'inquiéter. C'est un mauvais rêve mais je suis là maintenant. Tu veux pleurer parce que c'était dur? Vas-y. Je te consolerais et puis on prendra des tartines de pain grillé avec du beurre et du Nutella.
Pourquoi Franck veut pleurer de se réveiller dans ces conditions? Dans des bras aussi accueillants? Bercé par l'amour qui chasse le vieux chagrin très profond, d'un simple revers de main? Pourquoi?

... Juste parce que ça fait du bien quand ça se passe enfin comme ça. Parce que des fois on y croyait plus.

Franck se réveille.
Il réalise.
Encore.

mercredi 25 août 2010

Le pari

J'avoue mon étonnement quand je me vois faire certaines choses. Je me dis "arrête Franck, ne fait pas n'importe quoi...". Comme je produit encore et encore mon petit effet nuisible sur moi-même j'ai décidé de m'éloigner de moi quelques temps pour laisser à mon corps le temps de reprendre des forces. Et puisque ça ne tient qu'à cela je vous le dit. Franck ne mange pas encore les pissenlits par la racine. Il les cueille. Tendrement.
Il m'a dit hier « tu viens chez moi demain? » et je lui ai répondu d'accord...
Je l'aurais cru mort, moi, longtemps, avant qu'il ne m'envoie ce message.


Quand je le vois aujourd'hui c'est un Adonis un peu fleur bleue qui m'ouvre la porte.
J'entre dans son appartement et je vois assez vite que quelque chose à changé. Franck me colle, reste un pas derrière moi pour ne rien perdre de l'expression que j'afficherais semble-t-il lorsqu'en pénétrant dans l'appartement je prendrais enfin conscience de tout ces changements. Il m'observe avec une sorte d'impatience contenu, un sourire d'enfant aux lèvres. Un enfant surexcité la veille de noël.
Il y a... un diffuseur de parfum d'intérieur dans la pièce. Une odeur agréable de Jasmin ou de je ne sais trop quoi. Ça m'interpelle.
Un parfum d'intérieur.
Je vois aussi dans un meuble un pot-pourri, un meuble dans lequel toutes les choses sont bien rangées.

C'est ça.
Ça sent bon un odeur affreuse de bien-être intérieur pour ceux qui veulent trouver la paix de l'esprit grâce à du thé bon marcher dans un emballage faussement oriental.
Les asiatiques n'emballent pas leur thé dans du papier recyclés jauni aux colorants pour faire plus authentique. Enfin, je ne crois pas. Non, dans cet appartement, l'ambiance est saine, la disposition des meubles est harmonieuse et permet de mettre en valeur subtilement un côté chaleureux, dans un appartement dans lequel il fait décidément bon vivre.

Franck a remarqué que ça y est. J'avais remarqué.
« C'est Senteur Printanière. Ça sent bon, hein? T'as vu comme on respire mieux dans un appartement un peu plus naturel? C'est pour ça que j'ai mis un bouquet de fleur là ce sont des pissenlits mais quand-même on se rend pas compte que même des pissenlits c'est des fleurs et au final on se formate comme ça mais c'est super beau des pissenlits. J'ai déplacé ce meuble là, ça me permet d'ouvrir grand cette fenêtre, pour respirer tu comprends... C'est super important de respirer. Je le trouve super beau mon appartement comme ça et puis les pot-pourris que j'ai mis là et là je trouve que ça décore bien. Tiens viens voir j'ai acheté un super bouquin qui parle de comment on gère l'espace d'une pièce pour le rendre plus harmonieux parce que j'en avais quand-même assez de vivre dans ce truc oppressant non? Faut bien admettre que c'était pas génial comme cadre de vie c'est vrai dans ma tête aussi d'ailleurs c'était pareil mais quand tu cleans autour de toi c'est aussi en toi que tu cleans je sais plus qui disait ça... »

Pendant qu'il me décrit en détail les éléments qui composent harmonieusement sa toute nouvelle personnalité je peine à cacher au plus profond de moi ma répulsion. Où est Franck? Cet individu n'est pas lui. Assurément. Je ne sait pas vraiment où il est passé mais quelque chose me dit qu'il n'est pas très loin derrière se regard tout sourire un peu éteint. Et j'en ai la certitude à l'instant où je sens qu'il perd un peu le rythme dans son flot d'explications... Parce qu'il a remarqué que je me posais des questions.
Et je vois passer dans ces yeux un léger malaise.

La scène dure moins d'une seconde mais je repense alors à un regard que j'ai déjà vu qui me criait au secours. Et aujourd'hui, si ce n'est pas Franck que je vois, au moins c'est quelqu'un qui n'a pas un regard qui hurle. Alors je décide de préférer celui-ci et je prends la personnalité qui va avec...
« … Et tu change ton bouquet tout les combien de temps?... »
Franck sourit légèrement. Un peu soulagé.

Tu as dû aller bien loin, Franck, pour en revenir comme ça. Et alors que je te regarde je pense à l'effet que ça doit faire d'abandonner sciemment sa personnalité pour cause... d'incompatibilité.

Non bien sûr à cette époque c'était pas drôle. Mais c'était toi. Et le personnage que je vois là, je ne sais pas. Il me fait peur...