mardi 15 février 2011

Expliques-moi lorsque tu remue tes hanches devant mon visage, je ne comprends pas.

Franck, en bon dandy qu'il sait être parfois, garde un sourire charmant aux lèvres. Manière la plus délicate qu'il connaisse d'éconduire subtilement une jeune femme lorsqu'il la connait à peine. Il commande une autre bière ce qui laisse à la demoiselle le temps de se recomposer une allure, puis il poursuit où ils se sont arrêtés. Elle ne semble d'ailleurs pas dérouté par la conversation qui a repris comme si de rien n'était.
Ils sont dans un bar un peu cosy. Le genre d'endroit à la mode. Le genre de lieu dans lequel Franck est certain qu'il ne rencontrera personne. La jeune fille est objectivement une jolie fille, c'est vrai, et il se demande d'ailleurs en passant ce qu'elle peut bien lui trouver. Question qu'il s'est posé à chaque fois qu'il s'est trouvé dans les bras d'une femme. Allant comiquement jusqu'à envisager de leur part la prise d'une drogue inconnue. Une drogue qui a systématiquement fait tomber ces femmes shootées dans les bras de Franck plutôt que dans ceux d'un autre. Il se dit cela depuis le premier baiser qu'on lui a pris, attribuant toutes ses formidables expériences à un misérable concours de circonstance, se trouvant au bon endroit au bon moment.
Il attend presque comme un juste retour des choses le jour où il n'aura plus cette chance insolente de ne jamais avoir fréquenter de femme quelconque.
Il attend le jour où il devra se contenter d'essayer simplement de ne pas mourir seul.
Le temps passe, Franck. Et tu vas mourir.

Cette idée de tout cet amour qui échappe à sa sphère de compréhension le poursuit comme le crocodile du capitaine Crochet. Tic tac! Tic tac...! Le temps passe Crochet et le crocodile te trouvera. L'amour échappe à la sphère de compréhension de Franck et ça le fait trembler, comme une menace permanente.
Un jour tu vas mourir, Franck. Et seul. Juste parce que tu ne comprends pas l'amour et que le temps ne s'arrête pas, lui.

Pour se rassurer, il traine avec lui le souvenir de ces femmes qui l'ont aimé. Pour se dire qu'il n'est pas si seul finalement. Sauf qu'au fur et à mesure, de ses femmes tantôt qui finissent par avoir des enfants, tantôt qui finissent par se marier, ne reste qu'un souvenir de plus en plus lointain de lui et d'elles. Parce qu'il n'a pas su à l'époque où une-tel aurait aimé le conduire à l'Autel ou une autre à la maternité. Ou juste le conduire sur un lit où ils pourraient rester quelques temps allonger et regarder passer les saisons.
À chaque fois la même question un peu en suspend dans le cerveau de l'enfant-Franck: la prise de drogue, et un hasard qui l'a conduit sur leur route, lui plutôt qu'un autre. Cela à commencer le jour où la plus jolie fille du collège a jeté son dévolu sur lui. C'est certain, Franck n'a fréquenté que des femmes droguées, avec dans sa poche un hasard extra-ordinaire. Et à force d'attendre le réveil des princesses, Franck n'a pas appris à parler le mensonge de l'amour.
À présent, avec des fantômes plein la tête, Franck attend le jour de leur réveil. À toutes.
Il court, il court le furet...

Franck est hanté par le souvenir d'une jeune femme. Il sifflote pendant un instant de silence entre lui et la fille qui est en face de lui. Elle s'absente une minute, elle retourne voir ses copines. Ok.
Franck se dit que de toute façon, même s'il se laissait l'opportunité d'être intéressé, il suppose fortement qu'il aurait fini par tout saboter. À cause des fantômes. Et aussi parce qu'ils semblent tous parler un langage qu'il n'est pas certain de comprendre. Ce qui ne l'empêche pas du reste de tourner les yeux vers la jeune femme lorsqu'elle lui fausse compagnie. Vers elle et les délicieuses vagues que produit son déhanché. Elle se retourne et l'a vu.
Elle sourit.

Du coup Franck calcule leur chances, leur viabilité. Dans un endroit comme ici, ça a tendance à chuter assez vite. Et de toute façon, les fantômes de Franck rôdent pour saboter subtilement ses entreprises.

Un jour ça arrivera, Franck, c'est certain... Tic tac! Tic tac...! Et alors, quand il se dit ça, parfois, une profonde fatigue s'installe dans la tête de Franck.
Et il est tenté parfois de se laisser aller à s'endormir ivre de tout cela, une nuit, sur le porche d'une maison inconnue, rafraichi par la neige qui tombe sur son visage.Vierge.

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